Rendre justice aux bulles de filtre

Duc Ha Duong
3 min readJan 23, 2023

10ème épisode d’une série hebdomadaire qui documente une réflexion partagée sur la réappropriation de notre identité sociale pour la mettre au service de nos projets. Il n’est pas trop tard pour rattraper les 9 premiers : Mais pourquoi montrer mes posts à des trolls et des haters ? / Comment trouver des personnes de bon conseil ? / Faut-il endiguer l’effondrement du mur pro/perso ? / Avons-nous besoin des influenceurs ? / Pourquoi Facebook et LinkedIn sont irrécupérables ? / La complainte du connecteur / Une plateforme pour être soi / Quel est ce tiers-espace où vivent les tiers-lieux ? / Mais si je l’écris, ça va se savoir !

Avez-vous entendu parler du phénomène de “chambre d’écho” ?

Eli Pariser en parle très bien dans son TED Talk, je vous y renvoie au besoin. En gros, c’est mal, ça polarise, et ça met des ennemis de la démocratie au pouvoir. Je vous propose aujourd’hui de prendre un peu de recul sur cette perspective puisque, comme toutes les techniques, rien n’est blanc, rien n’est noir.

Qui se souvient de la première fois qu’il a confié à un algorithme le soin de filtrer son flux d’information ? Je vous aide : on appelait ça un filtre bayésien (du nom de la fameuse ONG Bayes Impact … à moins que ça soit l’inverse tiens 🙄), ou encore un filtre antispam.. Eh oui, c’était il y a 20 ans, et aujourd’hui avec toute leur sophistication, personne ne s’en plaint !

Car les filtres antispam ne sont pas là pour nous servir de la publicité ciblée, ou augmenter notre temps passer sur notre boite mail, mais bien au contraire diminuer notre exposition publicitaire et nous permettre d’aller plus vite dans le traitement de nos messages.

Alors dans notre embrouille avec les médias sociaux, l’algorithme, le pauvre, n’y est pour rien au final, c’est surtout le contexte qui crée ces externalités négatives.

Dans un média social à but lucratif vivant de la pub, la mission est de :

permettre aux usagers de s’informer (média), en diffusant ces informations suivant un graphe d’influence (social), et gagner des sous avec le temps de cerveau disponible qu’on a pu capturer (lucratif).

Dans ces circonstances bien précises, il semblerait qu’en effet les algorithmes de recommandations n’ont pas pour effet de maximiser la qualité de l’information délivrée à l’utilisateur. Je salue au passage le travail de l’association Tournesol et vous invite à contribuer au projet visant à régler ce problème avec les vidéos.

Ceci dit, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, et changeons de contexte. Et si, au lieu d’une plateforme pour m’informer, on considérait une plateforme de productivité personnelle ? La mission serait de :

permettre à ses usagers de trouver l’aidant idéal sur ses défis ponctuels suivant un graphe d’influence, et gagner des sous en leur faisant gagner du temps, des efforts et de l’argent.

Le rôle de l’algorithme devient alors d’aller trouver parmi tous les autres utilisateurs de mon entourage ceux qui sont les plus susceptibles de m’aider, en fonction de leur expertise, de leur disponibilité, et de leur affection pour moi et mes causes.

Ne pas voir mes opposants n’est plus un problème, c’est une solution. J’ai très envie de me retrouver dans cette bulle bienveillante de personnes qui partagent mes causes. L’optimisation de l’algorithme consiste à faire gagner le maximum de temps aux utilisateurs grâce à l’aide apportée, laquelle aura sans doute lieu en dehors de la plateforme. On peut même rêver que le bénéfice apporté soit tellement valorisé que le bénéficiaire, qui n’est plus le produit, ait envie de librement donner une petite somme tous les mois pour rester en lien avec la multitude.

Réhabilitons les bulles de filtre, mettons-les à notre service en permettant des espaces numériques de confiance, de protection de notre vulnérabilité, celle-là même qui nous permet de demander de l’aide, et vivre dans un monde plus solidaire.

Envoyez-moi un message privé si vous souhaitez m’aider en réfléchissant ensemble à ce défi !

Arrosons-nous les uns les autres !

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Duc Ha Duong

Entrepreneur, father, barbarian, dreamer, prospectivist, teal evangelist, optimistic, french-vietnamese, parisian, feminist, caretaker. Blind to legal fictions.